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en Lorraine - Page 4

  • Histoire des chrétiens de Lorraine #1

        1     Commençons avec joie une grande aventure : raconter notre histoire de chrétiens dans notre région. Nous réjouir d’être héritiers de tant de belles réalisations… et aussi d’échecs, de maladresses voire de péché. L’Evangile arrive tout doucement chez nous au cours des 3 premiers siècles de notre ère.

       Les populations de ce qui deviendra le diocèse (la tribu gauloise des Leuques autour de Toul[1]), ont accueilli paisiblement la civilisation et la culture romaines autour du premier siècle. Elles accueilleront la foi chrétienne aussi paisiblement.

        La Cité des Leuques ? Une Cité à l’époque, c’est une tribu autour d’une ville capitale. La nôtre recouvrait les territoires que sont aujourd’hui la Meurthe et Moselle Sud, les Vosges, la moitié Sud de la Meuse et le tiers Nord de la Haute Marne. Une grande cité donc !

         Nous sommes au premier siècle de notre ère.

        La capitale est Toul [2] une petite cité gallo-romaine dont la fondation remonte aux années qui ont suivi la conquête de la Gaule par César (58-52 av. JC). D’abord située sur le St Michel, elle s’est étendue ensuite dans la petite plaine laissée par la Moselle, entre les eux bras de l’Ingressin (qui coule maintenant paisible …sous la ville !). Elle se développa après la conquête romaine, sur une très petite surface, constituée de la place du marché et du quartier Michâtel actuels. La ville « s’équipe » petit à petit à la romaine : places publiques, marché, théâtre, temples, bains …

        Il est possible que Naix aux Forges[3] (Nasium) ait été la première capitale des Leuques devenus Romains. Mais, à la fin du 1er siècle, c’est Toul qui l’a supplantée… et qui a même empêché Sion – l’autre grande ville - de devenir capitale. On a repéré plusieurs villas gallo-romaines au pied du St Michel, un atelier de potier dans le quartier St Evre et une nécropole dans le faubourg St Mansuy. La ville resta sans murailles jusqu’au 3ème siècle.

        Malgré sa petitesse, Toul est une cité bien reliée, ce qui fit sa fortune !

        Par les routes : celle venant de Lyon à Toul – véritable artère principale et impériale,  par Langres, Nijon, Soulosse puis Scarpone [4]et Metz; à partir de Metz, la route se dédoublait de chaque côté de la Moselle pour gagner Trêves et ensuite, Cologne ou Mayence. Une autre route venait de Reims et passait à Toul par la vallée de l’Ornain. Une autre route enfin, partait de Toul vers Sion, la grande rivale de Toul. (La route toute droite vers Colombey les Belles aujourd’hui)

        Par les rivières : La Moselle surtout pour le transport des personnes et des biens (notamment la pierre des carrières, les bois des massifs vosgiens).

        Mais il y avait aussi d’autres villes gallo-romaines : certaines ont développé un site urbain gaulois préexistant – Sion par exemple - ; d’autres furent de complètes créations : Nasium par exemple, située près d’une rivière car les villes romaines ont besoin de beaucoup d’eau en particulier pour les bains.

                La suite… dans le prochain numéro ! 

    [1] Mais aussi les Médiomatriques autour de Metz et Verdunenses autour de Verdun et un peu plus au nord, les Trévires autour de Trêves. Ces 3 tribus et la nôtre auront destinée commune jusqu’à la révolution française !
    [2] dont le nom est d’origine celtique et signifie « petite colline »
    [3] Petit village de la Meuse, près de l’oppidum gaulois de Boviolles. A l’époque romaine, bien plus étendu qu’aujourd’hui. Nombreuses fouilles récentes dans cette région.
    [4] Dieulouard aujourd’hui

  • Les nouveautés du blog....

    Chers amis,

     

    Voici quelques projets de « Foi et Culture » pour commencer cette année…

    Vous allez prochainement trouver sur ce blog une rubrique nouvelle d’histoire de notre diocèse… par petites touches pour nous réjouir de la vie chrétienne de nos ancêtres, nous sentir proches d’eux qui ont connu des difficultés comme nous, pour comprendre vraiment comme des héritiers … donc des fondateurs aujourd’hui. 

                « Pages d’histoire de l’Eglise qui est à Nancy »… Pages d’histoire seulement, car cette rubrique ne prétend pas être une histoire complète de la communauté catholique du diocèse de Toul d’abord, puis de Nancy et Toul aujourd’hui. C’est plutôt un parcours dans cette histoire, soulignant les points forts, les passages difficiles, les entreprises inaccomplies, les grandeurs et les ombres, au cours de ces longs siècles, depuis le milieu du 4ème siècle, temps de l’Evangélisation, jusqu’à 1914, juste avant les grands bouleversements qui feront naître nos 20ème et 21ème siècles et qui nécessiteraient une étude à eux tout seuls… « Pages d’histoire » aussi, parce qu’elles sont le fruit de mes curiosités – elles datent de ma classe de 4ème au lycée Poincaré de Nancy -, des conférences données, des cours assurés au grand séminaire de Nancy ou à l’institut des Sciences Religieuses, des recherches…au long des presque cinquante dernières années.

                « De l’Eglise du Christ qui est à Nancy et Toul » : cette manière de parler de l’Eglise est empruntée, on le sait, à l’Apocalypse de St Jean. Elle dit magnifiquement la réalité de l’Eglise diocésaine : l’Eglise du Christ dans sa plénitude présente en ce lieu – « Nancy et Toul », sur cette terre lorraine. Mais je l’ai choisi aussi pour une autre raison : j’ai voulu faire pressentir la vie profonde de la communauté catholique, des personnalités catholiques qui lui donnent une âme – saints, artistes, disciples humbles et riches …- la vie profonde de la foi, de la recherche de Dieu qui les saisit ; j’ai voulu montrer les évolutions théologiques, spirituelles, les passages difficiles…     J’ai voulu – ai-je réussi ? je ne sais – non seulement raconter les événements le plus sérieusement possible mais comment ils étaient sentis et vécus dans la foi… réalité qu’en France, on occulte systématiquement !... non par science – car le ressenti de la foi et son expression théologique sont des « documents de l’histoire » au même titre que les chartes et les bâtiments -, mais par idéologique laïciste qui déclare la foi sans réalité, réservée au privé et sans impact - !!!! - sur le donné historique !... voire troublant le donné historique. L’Eglise est donc toujours regardée comme une organisation (avec seulement les catégories de pouvoir, savoir, avoir …) jamais la recherche de Dieu, jamais la sainteté ! dont l’Eglise est pourtant le laboratoire avec constance depuis 2000 ans ! Sans nier cette dimension sociologique, je souhaite présenter l’histoire de notre Eglise locale comme un organisme vivant, avec ses exaltations, ses crispations, ses échecs, ses recherches laborieuses… sa vie… et son influence bien réelle, enfin !

                La citation, donnée en référence, tirée de l’épître aux Hébreux, vient me confirmer dans mon choix de présentation. Voilà comment l’auteur montre l’Eglise dans laquelle chaque disciple poursuit sa course : « Entourés d’une telle nuée de témoins, courons avec endurance l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus, qui est à l’origine et au terme de la foi. » (Epitre aux Hébreux 12/1-2). Je veux montrer au cours de ces pages, cette course des disciples du Christ sur notre terre, durant ces 16 siècles de vie chrétienne, de témoignage, de foi, d’espérance et de charité, avec leurs lumières et leurs ombres « les yeux fixés sur Jésus », origine et terme de notre foi. 

                A Nancy, le 3 juin 2017, en cette fête de Pentecôte, clôture de notre année diocésaine, où plus de 400 disciples d’aujourd’hui – jeunes et adultes - ont reçu le sacrement de la confirmation.                                      

    Père Jacques Bombardier de l’Oratoire St Philippe Néri de Nancy

     

  • 250ème ANNIVERSAIRE DE LA MORT DU ROI STANISLAS

    23 FÉVRIER 1766 – 23 FEVRIER 2016

    250ème ANNIVERSAIRE DE LA MORT DU 

    ROI STANISLAS ROI DE POLOGNE 

    DUC DE LORRAINE ET DE BAR

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    A Notre Dame de Bonsecours

    18H messe à la mémoire du Roi. 

    animée par la chorale la Joie du Mélode

    En présence des autorités de la ville 

    et de l’Académie de Stanislas.

    A l’issue de la messe, 

    Lecture d’extraits de l’éloge funèbre de Stanislas et dépôt de gerbes.

  • L’arbre de Noël

    4.jpgAu moment de faire le sapin, voici quelques éléments pour découvrir la symbolique chrétienne de l'arbre de  Noël, nourrir sa foi et celle des enfants... pour dépasser une peu le niveau seulement folklorique et découvrir que l'annonce de l'Evangile passe aussi par des réalisations concrètes.... même culinaires. Pour un catholicisme joyeux et humble! Père Jacques Bombardier.... Avec ses voeux de très joyeux et saint Noël.

    Il est parfois de bon ton de se moquer de la superstition populaire ou du paganisme de la fête de Noël que certains voudraient vivre dans une austérité, seule digne d’une fête. D’autres refusent de mettre des sapins dans une église !! Ce qui est païen dans les coutumes de Noël, ce sont les branches de gui, de houx pour décorer les murs ou les suspensions dans les pièces. Le sapin est lui, d’origine chrétienne.

                En effet, cet arbre de Noël que nous confectionnons dans nos maisons provient de coutumes très religieuses du Moyen Age et des Mystères sacrés joués sur les parvis des églises, en particulier dans la région du Rhin et en Alsace. L’arbre de Noël est né en Alsace. Les plus anciens témoignages de cette coutume remontent au XIIIème siècle dans la vallée du Rhin. L’essor de la coutume se produit au XVIè siècle.[1] A côté des scènes qui montraient la crèche et les bergers, il y avait des scènes qui évoquaient le Paradis : Adam et Eve, le diable tentateur et l’ange au glaive qui fermait l’accès au Paradis !

                Au milieu se dressait l’arbre du paradis.[2]

                Et l’arbre du Paradis devint… le sapin – il était difficile de trouver un pommier au mois de décembre ! Et puis le sapin est toujours vert… il ne meurt pas ! Sur ce sapin, on accrocha plusieurs pommes (le seul fruit disponible en décembre ! la fameuse petite pomme rouge d’Alsace[3]) et des représentations d’Adam et Eve en pain d’épices. La crèche au pied de l’arbre annonçait le salut : la fête de Noël, en effet, ouvre aux hommes à nouveau le Paradis ! Comme le chante le vieux cantique de Noël datant de cette époque 

                « Aujourd’hui Dieu rouvre l’huis « la porte ».

    Qui mène au beau Paradis.

    Le chérubin n’en défend plus l’accès

    A Dieu louange, honneur et majesté. »

            Progressivement le sapin de Noël passa de l’extérieur des églises à l’intérieur des maisons. En plus des pommes, on suspendit alors à l’arbre des hosties non consacrées : l’eucharistie donne la vie éternelle que l’arbre de vie devait donner ! Magnifique symbolisme : face à la « pomme[4] » qui a conduit l’homme à la mort, l’hostie le conduit à la Vie.

             Dès la fin du XVIe siècle vinrent s’ajouter des papillotes en forme de roses et autres fleurs en papier multicolore. Ces fleurs sont une allusion à un verset d’Isaïe[5] où il est question du « Rameau fleuri de l’arbre de Jessé ». C’était une manière d’évoquer l’ascendance de Jésus, « Fils de David » dont Jessé était le père. Elles nous rappellent aussi les paroles d’un chant ancien, très certainement composé à cette époque, intitulé en allemand actuel «Es ist ein Ros entsprungen» : une rose a jailli.

               Plus tard, par respect, on remplaça les hosties par des gâteaux en forme d’hosties qu’on accrocha dans l’arbre… Ces gâteaux, on les fabriquait durant tout l’Avent, avec un petit trou pour pouvoir les fixer aux branches du sapin par un ruban. Les moules permirent de les décorer et de représenter sur les gâteaux des scènes de la Nativité. En alsacien, on appelle ces gâteaux des « springerle » (littéralement petits sauteurs[6]). Ils sont à l’anis ; on confectionne aussi des pains d’épices pour les accrocher. On remplaça aussi les pommes par des boules.

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    springerle

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    Boules de Meisenthal.

    En effet, selon la tradition, en 1858, une grande sécheresse priva les Vosges et le des fruits et en particulier de pommes. Pas de pomme pour les sapins de Noël ! Un artisan verrier de Goetzenbrück travaillant à la verrerie de Meisenthal, eut l’idée de souffler des boules en verre. La mode était lancée. Et c’est au XVIIIème siècle qu’on fixa des bougies aux branches pour faire de cet arbre, un arbre de Lumière. Ainsi le sapin était prêt pour être montré en France en 1870 par les Alsaciens exilés suite à la guerre

     

    [1][1] Un manuscrit de la bibliothèque humaniste de Sélestat de 1521 parle des sapins : les gardes forestiers sont payés pour surveiller les forêts en raison de la quête intempestive de sapins par le peuple !

    [2] Une fresque dans une chapelle d’un lycée de Haguenau (Nord de l’Alsace), datant du XVe siècle, concrétise ce symbolisme par un arbre dont la couronne est nettement partagée en deux zones dans le sens vertical. D’un côté les pommes, de l’autre les hosties. Voir Histoire de l’arbre de Noël p. 6

    [3] On l’appelle toujours aujourd’hui Christkindel Apfel : pomme du petit Christ

    [4] Il n’est pas question d’une pomme dans le texte biblique mais d’un « fruit »… La pomme était disponible en décembre. Il y a peut-être aussi un glissement confusion avec la déesse des fruits, qui se dit justement « pomona » est en latin !

    [5] Is. 11/1

    [6] On peut voir de magnifiques moules à gâteaux de Noël au Muée des Srpingerle à La Petite Pierre dans le 67. Le musée est situé 11 rue des remparts, 67 290 La Petite Pierre.

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  • St Mansuy et les origines du diocèse de Toul.

                Le calendrier diocésain fête St Mansuy le 4 septembre, occasion pour nous de revenir à cette antiquité tardive où notre diocèse fut fondé.

                Faisons d’abord un petit tour dans notre pays :

                Trois peuples gaulois occupent notre région actuelle : Les Trévires (Trêves) au Nord Est ; les Médiomatriques (Metz) au Nord et les Leuques (Toul) au Sud. Aucun de ces peuples ne prit les armes contre les Romains. Aussi les Romains respectèrent-ils l’organisation des territoires (= des « cités ») et renforcèrent le côté « capitale » du chef-lieu des cités avec le titre de « cité libre » pour Toul. Les gaulois adoptèrent les dieux      romains comme en témoignent de nombreuses épitaphes retrouvées à Naix, Soulosse, Sion…[1]

             Notre pays des Leuques, à nos connaissances actuelles, connaît trois grands sanctuaires :  Grand.

                A l’écart de toute route ! La cité se développe surtout à partir du 1er siècle autour du sanctuaire dédié à Apollon Grannus (basilique, amphithéâtre pour

    17 OOO spectateurs, thermes…) C’est dans ce sanctuaire que se serait rendu Constantin - qui gouvernait la Gaule, l’Espagne et la Bretagne depuis 310 - lorsqu’il avait pris la succession de son père Constance Chlore. « Il avait conforté sa légitimité en se mettant sous la protection d’Apollon dont il disait avoir eu la vision dans le temple de Grand et qu’il invoquait sous le nom du Soleil ce que traduit dans ses monnaies, sa légende « Au soleil invaincu compagnon » de l’empereur. Ses panégyristes disaient que cette vision s’était accompagnée de la promesse d’un pouvoir universel. »[2] « La nature du pèlerinage de Grand est difficile à cerner. De nombreux fragments de statues et des inscriptions permettent de se faire une idée des divinités qui figuraient dans le sanctuaire: on a repéré des allusions à Apollon, mais aussi à Hygie (déesse de la Santé), à Esculape, à Bacchus, à Mercure, à Jupiter (en cavalier écrasant l’anguipède), à Epona, à Minerve, aux Déesses Mères. Ces représentations, très classiques et de tradition hellénistique, prouvent que l’influence romaine s’était imposée totalement, au détriment de l’art et des conceptions religieuses indigènes. Par un cheminement rituel, les pèlerins franchissaient d’abord le pomerium en faisant acte d’allégeance aux dieux, avec quelques offrandes, gâteaux et fruits. Ils allaient ensuite se purifier le corps dans l’un des établissements de bains (deux à l’extérieur du rempart, deux à l’intérieur) qui étaient alimentés par des aqueducs de surface. Ils entraient alors dans l’enceinte, puis dans le portique pour aller à la fontaine sacrée profiter de ses vertus thérapeutiques. Un ex-voto trouvé sur le site porte la formule «somno jussus» («ayant reçu des consignes pendant son sommeil»). Cela semble indiquer qu’on y pratiquait l’incubation : sous le portique, couché sur le sol (ou sur la peau d’un l’animal qu’il a offert en sacrifice), le consultant s’endormait et ses rêves étaient censés lui apporter la révélation prophétique qu’il avait sollicitée ou lui donner des indications sur la manière de recouvrer la santé. Apollon lui-même pouvait lui apparaître en songe pour lui indiquer le traitement à suivre. Ce rite d’incubation était pratiqué à Épidaure et, à Rome, dans le sanctuaire asclépien de l’île Tibérine. »

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    Le théâtre – amphithéâtre de Grand. Edifice mixte fréquent en Gaule.

    Deneuvre.

                L’autre grand temple attirant de nombreux fidèles était celui de Deneuvre  au Sud Est du domaine des Leuques. Le Temple était dédié à Hercule et le culte se rendait dans une zone de sources : la divinité romaine assumait la vision gauloise que les dieux se communiquaient aux hommes par l’eau des sources. Le mythe des 12 travaux d’Hercule est relu à cette époque comme un itinéraire d’humanisation que l’homme doit reproduire aidé par le dieu. C’est aussi un lieu de guérison (on ne sait de quoi) et d’exaucement : les stèles - ex voto – en témoignent.

                En effet, de très nombreuses stèles – sculptées sur place dans la pierre locale - d’Hercule dormant ou combattant, témoignent de la ferveur et de la fréquence du lieu. Créé vers 150 de notre ère, le temple connut un maximum de fréquentation dans les années qui suivirent. Puis alternent les périodes prospères et plus faibles. Vers 375, le lieu est systématiquement et minutieusement détruit, sans doute par la communauté chrétienne locale.

                Le musée actuel de Deneuvre est situé sur l’emplacement du temple dont il reconstitue avec minutie la réalité de l’époque prospère.

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    Petit temple sur une des sources. Temple  reconstitué au musée de Deneuvre

                Sur la colline de Sion, troisième sanctuaire, les celtes vénéraient le dieu de la Guerre Wotan et la déesse de la fertilité et de l'abondance Rosmerta. Lors de la conquête romaine de la Gaule, l'enceinte de Sion était une des places forte des Leuques. La colline connaissait alors un commerce actif avec la péninsule Italique, fait de céramiques campaniennes, d'amphores et de vaisselle métallique. Elle constituait géographiquement un point de contrôle, implanté sur l'axe nord-sud reliant la Saône à la Moselle.

                « De nombreux vestiges d’habitation ont été mis au jour sur le site pour cette période : fondations de murs, caves, fragments de mosaïques. Cet ensemble reflète une certaine richesse, qui se traduit aussi par du mobilier : fibules, épingles, plats et statuettes en bronze (dont le célèbre Hermaphrodite).  Au lieu-dit Les Grands Champs (sur la colline de Sion), une nécropole a livré plusieurs tombes à incinération ou à inhumation. Enfin, une inscriptionau dieu romain du commerce Mercure et à la déesse gauloise de la fertilité et de l’abondance Rosmerta semble indiquer l’existence d’un sanctuaire gallo-romain. »[3]

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     Saxon-Sion, La Côte de Sion, Inscription en l'honneur de Mercure et Rosmerta, Musée Lorrain - Pierre Mignot 

             Le pays des Leuques a une capitale, renforcée dans l’autorité par les Romains. Toul – dont la grande rivale est Sion, sans doute plus riche - est alors une petite cité gallo-romaine dont la fondation remonte aux années qui ont suivi la conquête de la Gaule par César (58 av. JC). La rue Michâtel repose sur le « cardo » de la ville romaine situé environ 8 m sous le niveau actuel.

                La cité est bien reliée, ce qui fut sans doute sa force face à Sion.

                Par les routes : celle venant de Lyon par Langres à Toul ; par là, la cité était reliée avec le sud, lieu de culture et d’économie prospère. A partir de Metz, la route se dédoublait de chaque côté de la Moselle pour gagner Trêves et ensuite, Cologne ou Mayence. A Metz, cette route croisait l’axe Ouest/Est venant de Reims vers Trêves. De plus, une route venant de Reims passait à Toul par la vallée de l’Ornain et une autre allait vers le Donon et Strasbourg. Une autre route partait de Toul vers Sion. (La route vers Colombey les Belles aujourd’hui)

                Par les rivières : La Moselle surtout pour le transport des personnes et des biens, notamment la pierre des carrières mais aussi la Seille (pour le transport du sel), la Meurthe (pour le flottage du bois)

                L’édit de Caracalla en 212 conféra la citoyenneté romaine à tous les habitants de l’Empire libres.

                Mais l’anarchie dans l’Empire entre 235 et 285 permit l’invasion des Francs et des Alamans et un sentiment d’abandon par l’autorité romaine pour les populations. Un redressement eut lieu de la part des autorités impériales entre 285 et 350. Mais des incursions barbares reprirent en 352, 356-57, 366-67, 377-78… Les peuplades arrivaient par la Moselle ou par le seuil de Saverne.

                La réorganisation de Dioclétien et de Constantin donna une grande importance à Trêves où résidait le gouverneur - consulaire de l’ordre sénatorial - de la région et conduisit les villes à se doter de remparts et à resserrer leur surface, signe d’une réelle crise économique. Seule Metz reste une grande ville. Certaines villas luxueuses de campagne furent abandonnées à cause des invasions.

    Une diffusion du christianisme par les militaires à partir du IIIè siècle

     maurice.png St Maurice d’Agaune et ses compagnons soldats, coptes venus de Thèbes en Egypte, martyrs du Valais, sont morts pour leur foi vers la fin du IIIème siècle. Les soldats de la légion thébaine avaient reçu l’ordre de tuer tous les habitants près d'Octodure (la ville de Martigny au Nord des Alpes), qui avaient été convertis au christianisme le ministère de St Materne. Le refus de saint Maurice et celui de sa légion d'obéir à cet ordre, a été la cause d'un célèbre martyre, le massacre de la légion  thébéenne. Le christianisme se diffusa beaucoup dans les milieux militaires et par eux, dans l’Empire. Un des plus vieux sanctuaire toulois, dédié à St Maurice et construit par St Evre au début du VIème siècle, peut être un témoin de cette mission des militaires et même de l’influence de St Maurice d’Agaune.

             IVème siècle      

             Sans doute aussi une annonce du Christ par St Athanase d’Alexandrie… allant en exil à Trêves et passant nécessairement à Toul. Quand on connaît la fougue et le zèle apostolique du prélat, ce serait étonnant qu’il n’ait pas parlé du Christ à Toul !

                En effet, le 5 février336, Athanase doit prendre le chemin de l'exil à Trêves. Il y séjourne pendant un peu plus d'un an, du printemps 336 à juin 337. Il  a des compagnons égyptiens comme lui et y est bien reçu par l'évêque de la ville St Maximin. Réside également à Trèves le « César Constantin », fils aîné de l'empereur, qui devient le protecteur d'Athanase. L'empereur Constantin 1er  meurt  dans la ville de Nicomédie le 22 mai 337, et la nouvelle parvient à Trèves dans les premiers jours de juin. Le 17 de ce mois, le césar Constantin envoie une lettre au peuple et au clergé d’Alexandrie : il y affirme que l'intention de son père était de rétablir Athanase sur son siège, et que lui-même va exécuter cette volonté. Athanase arrive le 23 novembre à Alexandrie, où il est accueilli en triomphe par ses partisans, mais où ses ennemis provoquent aussi des tumultes.

                Et Athanase n’est pas le seul père de l’Eglise d’importante à être passé à Toul.  St Jérôme (347-420), St Martin (316-397) et St Ambroise (né à Trêves en 340) se rendant à Trêves ou en revenant,  passèrent dans la ville. Le poète Ausone (309-394) précepteur de Gallien puis préfet des Gaules séjourna à Toul et chanta la beauté de la Moselle. (extrait de l’Idylle  X[4]) : On pourra constater toute l’activité économique de ce fleuve évoquée par Ausone autant que la beauté de ses rives :

    « Ces belles eaux de la Moselle qui roulent à leurs pieds[5] avec un doux murmure. Salut, fleuve béni des campagnes, béni des laboureurs ;  fleuve riche en coteaux que parfume Bacchus, fleuve tout verdoyant, aux rives gazonneuses : navigable comme l’océan, entraînée sur une douce pente comme une rivière, transparente comme le cristal d’un lac, ton onde en son cours imite le frémissement des ruisseaux, et donne un breuvage préférable aux fraîches eaux des fontaines : tu as seul tous les dons réunis des fontaines, des ruisseaux, des rivières, des lacs, et de la mer même, dont le double flux ouvre deux routes à l’homme. Tu promènes tes flots paisibles sans redouter jamais le murmure des vents ou le choc des écueils cachés. Le sable ne surmonte point tes ondes pour interrompre ta marche rapide, et te forcer de la reprendre ; des terres amoncelées au milieu de ton lit n’arrêtent point ton cours, et tu ne crains pas qu’une île, en partageant tes eaux, ne t’enlève l’honneur mérité du nom de fleuve ! Tu présentes une double voie aux navires, soit qu’en se laissant aller au courant de ton onde, les rames agiles frappent ton sein agité ; soit qu’en remontant tes bords, attaché sans relâche à la remorque, le matelot tire à son cou les câbles des bateaux. Combien de fois, étonné toi-même du retour de tes eaux refoulées, n’as-tu pas pensé que ton cours naturel s’était ralenti ? L’herbe des marécages ne borde pas tes rives, et tes flots paresseux ne déposent point sur tes grèves un limon impur. Le pied qui t’approche ne se mouille jamais avant d’avoir effleuré tes ondes.

                O Moselle, on doit te célébrer aux plages étrangères, te célébrer partout et non pas seulement aux lieux où, jaillissant de ta source, tu découvres l’éclat doré de ton front de taureau, où tu traînes à travers les champs tes ondes calmes et sinueuses, aux ports enfin de la Germanie, où s’ouvre ton embouchure. Tu seras connue des fontaines, des sources vives, connue des fleuves azurés, des antiques forêts qui font l’orgueil des campagnes ; pour toi la Drôme, pour toi la Durance qui porte çà et là sa course incertaine, pour toi les fleuves des Alpes auront des hommages, ainsi que le Rhône lui-même, qui traverse une cité qu’il partage, pour donner aussi un nom à sa rive droite. Et moi, je te recommanderai aux flots bleus des étangs, aux grandes rivières mugissantes, à l’océan de ma Garonne. »[6]

             L’absence de martyr dans notre région sous le règne de Dioclétien – dont la persécution généralisée et organisée fut terrible pour els chrétiens – montre la petitesse te la discrétion de la communauté chrétienne de Toul.

             L’organisation de la communauté autour d’un évêque :

              C’est dans la 1ère moitié du IVè ( 50 ans près Metz qui eut son évêque dans le  dernier quart du IIIè) que Mansuy/ Mansuet (Mansuetus = le doux)  arrive à Toul et devint le premier évêque d’une communauté chrétienne déjà existante.  Vraisemblablement, Mansuy est un évêque itinérant de la Belgica prima, le premier à s'être fixé en fin de vie à Tullum. Il aurait exercé son ministère de 338 à 375. La première Vie de St Mansuy fut écrite au Xème siècle, par le moine Adson abbé de Montier en Der.

                Ce qu’on sait de sûr, c’est que Mansuy édifia aux portes de la Cité, hors les murs, un oratoire, une petite église qu’il dédia à St Pierre et dans laquelle il fut enterré. Ce lien à St Pierre est très symbolique et intéressant : cela ne veut pas dire, comme on l’a enseigné longtemps, que l’apôtre Pierre aurait envoyé Mansuy à Toul ; cela montre simplement l’attachement naissant au siège de Pierre par lequel Toul est rattachée à la mission apostolique.  Plus tard une abbaye s’éleva sur son tombeau jusqu’à la Révolution et son corps demeura à cet endroit jusqu’en 1990.

                Le miracle le plus célèbre du saint fondateur est la résurrection du fils du gouverneur romain de la ville qui s’était noyé dans la Moselle.

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    Tombeau de St Mansuy sculpté au XVIè par Mansuy Gauvain un des grands sculpteurs de la Renaissance en Lorraine. Il est aujourd’hui dans la cathédrale de Toul.

             Il ne faut pas imaginer que le premier oratoire créé par St Mansuy avait la forme d’une chapelle… En cette période qui suit de près la Paix de l’Eglise par l’édit de Constantin de 313, ce doit être encore une « maison église » : les chrétiens avaient aménagé des maisons déjà existantes ou construit directement des maisons dont l’aspect extérieur était celui d’une maison mais dont l’aménagement intérieur était adapté aux célébrations chrétiennes. On les appelle des « Maisons églises » sans penser qu’il y eut un plan uniforme tout de suite !

                Les fouilles archéologiques  nous ont offert plusieurs exemples de ces « maisons églises » : la mieux conservée est celle Doura Europas dans le sud de la Syrie actuelle, Cirta (l’ancienne Constantine) et Théonas dans la région d’Alexandrie. Des oratoires du même type se trouvent dans les villes des diocèses du Sud de la France à la même époque.

                St Mansuy, selon la tradition, eut pour successeur St AMON, ermite au « val de St Amon » entre Favières et Gémonville. Il y vivait avec quelques disciples. Devenu évêque, il alternait entre son ermitage, Toul et la région. On a gardé aussi le souvenir de sa lutte contre l’hérésie, sans doute l’arianisme. Il fut inhumé à côté de St Mansuy à l’oratoire St Pierre. On a retrouvé son corps au XIè sous l’épiscopat d’Hermann et transporté ses reliques à la cathédrale. Les deux successeurs St ALCHAS et St CELSIN furent inhumés à côté de St Mansuy. Nous ne savons rien d’eux. 

             Les premiers saints, martyrs sous Julien l’Apostat ou non

             Sainte Libaire

             Elle naquit et mourut à Grand d’où sept voies romaines divergeaient en étoile.Sa vie nous est connue par une Passion écrite au XIème siècle !Elle était bergère, chrétienne de la première génération à Grand, elle fut arrêtée pour ce motif et fut sommée d’adorer les divinités officielles. Son refus entraîna son exécution, sur la voie romaine, en direction de Soulosse, à la deuxième  borne milliaire. Les fidèles ramenèrent son corps dans la ville, aux portes, là où s’élève aujourd’hui la chapelle qui lui est dédiée.Un cimetière – qui existe toujours - commença à se former autour de sa tombe.
         

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      La chapelle Ste Libaire à Grand

    St Elophe.

             C’est le premier martyr lorrain et l’un des plus anciens personnages religieux connus de notre histoire. Comment le connaissons-nous ?  Par une Passion contenue dans un manuscrit de Cologne rédigé peu après 1036 et conservé à la bibliothèque royale de Bruxelles. D’autres manuscrits se trouvent dans les bibliothèques de Glogaw  en Silésie, de Ratisbonne, Trêves… La région, rappelons-le,  se trouvait alors traversée par une des voies romaines les plus importantes de l’Occident, celle qui reliait Rome à Cologne par les vallées du Rhône, de la Saône, de la haute Meuse et de la basse Moselle.

    Nous sommes au IVème  siècle, sous Julien l’Apostat (361-363). Selon cette Passion, Elophe appartenait à une famille patricienne de Grand et il aurait plusieurs frères et sœurs :  Euchaire, Menne, Libaire, Suzanne, Ode et Gontrude.  

     C’était un chrétien zélé et intrépide qui n’hésitait pas à proclamer sa foi à Grand et à Soulosse (Solimariaca), oppidum gaulois situé sur le haut de la colline et signalé dans les anciennes cartes comme l’Itinéraire d’Antonin et la Table de Peutinger. Solecia situé un peu en dessous de l’oppidum était un relais romain situé auprès du pont qui enjambait le Vair. Le zèle d’Elophe le conduisit même à détruire des idoles païennes.

    Arrêté par les autorités romaines locales, il est jeté en prison, jugé et condamné à la décapitation, signe de sa condition sociale élevée. L’exécution a lieu au bord du Vair à Soulosse aujourd’hui. La légende raconte qu’aussitôt après son exécution, il prend sa tête dans ses mains et remonte la colline voisine avec un arrêt dans la montée au bord d’un rocher qu’on voit encore, avant de mourir en haut de la colline là où se trouvent aujourd’hui l’église et son tombeau. Un pèlerinage se crée aussitôt et de nombreux miracles. Telle est rapidement résumé le texte de cette Passion lue, dans la liturgie de la fête, aux fidèles à Cologne chaque année au 16 octobre. 

    Le portement de tête : ce fait est raconté pour la vie d’une soixantaine d’autres martyrs ! On les appelle les saints céphalophores. Le plus célèbre est St Denis de Paris. Ce détail a une portée mystique : St Jean Chrysostome dit à propos de deux martyrs d’Antioche : « De même que les soldats montrant les blessures qu’ils ont reçues en combattant, s’adressent au Roi avec confiance, ainsi les martyrs portant dans les mains leur tête coupée, obtiennent du Roi des Cieux tout ce qu’ils veulent. »

    L’archéologie complète nos sources : le catalogue des fouilles faites à Soulosse présente une centaine de très beaux objets découverts en 1948 et 1967. Parmi ces objets, deux, du VIème siècle, nous intéressent plus particulièrement dans notre histoire : une inscription lapidaire déposée au musée d’Epinal, en mémoire de deux femmes qui étaient devenues chrétiennes ; une coupe de bronze sur laquelle est gravée le poisson (en grec, ichthus : avec chacune des lettres ont peut composer une profession de foi chrétienne : i JESUS ch Christ th de Dieu u le fils s sauveur) 

    De plus, autour du tombeau du saint dans l’église, on a trouvé des tombeaux mérovingiens, datant du VIème siècle, de notables qui se sont fait enterrés là, volontairement. La dévotion au saint date donc d’une époque proche de son martyre.

    St Gérard en 965 vint vénérer les reliques, en fit trois parts, une pour le lieu, une pour la cathédrale de Toul et une pour Cologne (Grand St Martin) qu’il se chargea lui-même de porter dans sa vile natale. On possède même le parchemin du Xème siècle relatant l’acte de St Gérard !

    On peut suivre à pied le chemin du martyre : La chapelle Ste Epéotte : lieu de la décapitation dans un méandre du Vair. Elle date du XVIème siècle. Elle fut tenue longtemps par un ermite. A côté de St Elophe, sa sœur Ste Libaire. La fontaine :  à mi-côte. Une source d’un versant calcaire bien connu dans nos régions.  La reculée : une petite grotte dans un rocher, lieu de  repos du martyr ;  la chaire de St Elophe dans le cimetière : elle proviendrait d’un édifice gallo-romain des alentours car la pierre n’est pas celle du pays ou peut-être même de l’amphithéâtre de Grand, comme les sièges curules réservés aux notables. Enfin, l’église et le tombeau : du XIème siècle et du XIIIème, terminée au XVIè. Ce tombeau est une dalle sur sept petits piliers auxquels s’adossent des figurines  humaines : la famille de St Elophe ? Mais il y a aussi Véronique et son linge ? St Elophe, en gisant, est représenté en diacre… puisqu’il prêchait ! Son visage est particulièrement paisible.

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    Chapelle Ste Epéotte au bord du Vair         

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    Tombeau de St Elophe dans l’église

             Sainte Menne, non martyre.

                Nous ne savons pas beaucoup de choses sur sa vie. Seule une Vie du XIIème siècle nous parle d’elle.  Menne est née à Soulosse. Elle fut confiée à l’évêque Memmie de Chalon sur Marne. C’est là que se précisa la vocation d’ermite de la jeune femme. Elle vécut d’abord dans la solitude en Champagne puis revint en Lorraine, dans le Saintois, entre Poussay et Puzieux. Elle  mourut le 3 octobre d’une année de la fin du IVème siècle, tout près du village de Blénod les Toul. Ses reliques furent transférées à l’abbaye de Poussay par St Léon IX. Au XVIè siècle, Hugues des Hazards, chancelier de Lorraine et bientôt évêque de Toul, originaire de Blénod, construisit une chapelle en l’honneur de Ste Menne sur le territoire de sa commune d’origine.



    [1] Voir musées d’Epinal et Lorrain

    [2] L’antiquité tardive en Provence  Naissance d’une chrétienté sous la direction de Jean Guyon et Marc Huijmans. 2013 p. 25-26

    [3] Présentation  sur site de Sion.

    [4]Traduction E.F. Corpet, 1843

    [5] il s’agit des murailles de la cité gallo-romaine

    [6]Ausone ou Decius ou Decimus Magnus Ausonius, est né en Aquitaine soit à Bazas (Gironde) soit à Burdigala (actuelle Bordeaux) en 309/310 et mort en 394/395 ap. J.-C. dans la villa paternelle située dans le vignoble bordelais entre Langon et La Réole où il s'est retiré à la mort de son protecteur, l'empereur Gratien. Il fut professeur et conseiller politique du Bas-Empire romain. Ausone est surtout renommé par son statut littéraire : poète de langue latine, ce fin lettré du Bas Empire occidental est l'auteur de vingt livres en latin. Mais la littérature française le tient pour le premier représentant d'une longue tradition, celle des lettres latines de France et de l'usage du latin moderne dans ce pays jusqu'à nos jours.

  • Le Pays Haut

    Comme en promenade (4)

                Franchissant le Rupt de Mad quelques kilomètres au nord de Pont-à-Mousson, nous entrons dans un autre pays dont bien des traditions de vie et de spiritualité sont différentes de la Lorraine du sud. C’est le Traité de Francfort de 1871 qui a créé un nouveau département, la Meurthe et Moselle, dont la configuration très particulière est imposée par le regroupement de territoires conservés des anciens départements de la Meurthe et de la Moselle ; la région de Briey, Longwy et Longuyon jusque là département de Moselle et dépendant du diocèse de Metz, se voit rattachée à Nancy, tant pour l’administration civile que religieuse. Au religieux, il n’y avait pas 100 ans qu’elle était dépendante de Metz : en 1789 en effet, cette région faisait partie des « doyennés vallons » du diocèse de Trêves !

                En contrecoup, l’annexion par les Allemands de la sidérurgie lorraine des vallées de l’Orne et de la Chiers, va stimuler le développement d’une nouvelle sidérurgie dans les hautes vallées de l’Orne et de la Chiers, du côté de la Meurthe et Moselle. Les Maîtres de Forges de Wendel, par exemple, construisent l’usine de Joeuf en 1881. Ainsi le Pays Haut déjà si différent du reste du département par ses habitudes de vie, son habitat, sa piété, par ses paysages ... va être encore plus étrange par une industrialisation intense et omniprésente jusqu’à la dernière crise qui en a vu presque la disparition. On pensait alors la partition lorraine provisoire: aussi chaque année, à Mars-la-Tour, se tenaient-elles des réunions patriotiques qui appelaient la réunification et Mgr Turinaz de Nancy, « l’évêque de la frontière », soutenait le moral lorrain de ses paroles enflammées. 

                Dans cette situation que l’on pensait provisoire, le Pays se développe pourtant rapidement: la vie rurale en est toute bouleversée; le gisement de fer lorrain devient le deuxième exploité du monde (116 000 hectares), le pays se hérisse des chevalements des mines et des cheminées des usines; la sous-préfecture de Briey se trouve être un des huit centres mondiaux d’émigration (avec New-York !) accueillant plus de 32 nationalités et voyant sa population passer en 30 ans ( 1906-1936) de 25000 habitants à 160 000 ! Les Lorrains voient arriver au pays des Italiens, puis des Polonais, des Tchèques....Et ce n’est pas sans tension et sans incompréhension, entre les immigrés eux-mêmes! Tout l’univers est bouleversé. Le travail est très rude, les conditions sociales précaires. En raison peut-être de sa nouveauté et de ses mélanges de populations, « le Pays haut est moins perméable au syndicalisme que l’agglomération de Nancy ou que le bassin de Neuves-Maisons où les ouvriers de Chatillon Commentry ont apporté de l’Allier leur tradition d’organisation de classe. La faiblesse du mouvement ouvrier organisé n’est pas incompatible avec de brusques explosions de grèves comme celle que l’on a pu observer en Meurthe et Moselle en 1905. (Histoire de la Lorraine Parisse. privat p.403)

                Longwy avec son agglomération, est la plus grande cité du Pays Haut. La ville, avec son château sur la hauteur et sa ville basse, est l’objet des convoitises françaises depuis longtemps. Assiégée par les Français en 1646 et en 1670 et  prise, elle fait alors partie d’un vaste système de conquête de l’Est de la France par la monarchie française. Le rattachement de la ville est accompli en 1678. En 1679, Louis XIV fait construire par Vauban à Longwy-haut une citadelle, dont bien des éléments sont encore visibles aujourd’hui. En 1683-90, on fit construire l’église St Dagobert avec des clochers permettant de servir de tours de guet.

                Depuis le belvédère, on a un beau panorama sur l’activité industrielle de la cité, même si les restructurations récentes en ont très considérablement diminué l’étendue et demeurent une blessure dans le cœur  de bien des longoviciens.

                Est-ce la proximité avec la Belgique du Cardinal Cardjin qui explique les efforts impressionnants développés dans le Pays Haut pour développer l’Action Catholique ? Peu importe: le Pays Haut en tout cas, fut la terre de choix de cette forme d’apostolat née dans la grande industrie et voulant à la fois participer à l’essor de la cité, à la valorisation du travail et à l’annonce de l’Evangile.

  • Pont-à-Mousson

    Comme en promenade (3)

    Pont-à-Mousson.         (Terre du duché de Bar jusqu’en 1766, rattachement à la France)

                En longeant la Moselle vers Metz, après avoir laissé sur notre gauche les forteresses de Dieulouard et de Preny, nous entrons dans la cité Pont-à-Mousson. Aux pieds de la colline où se dressent les ruines du château citadelle de Mousson, résidence des ducs de Bar d’où partira pour la croisade Louis II de Mousson en 1099, s’étend la « ville neuve du Pont-à- Mousson » voulue par le comte  Thiébaut 1er de Bar au début du XIIIè siècle.

                L’église Saint Martin, sur la rive droite de la Moselle, garde la mémoire de la fondation en 1217 d’une « Maison Dieu » confiée à l’ordre de St Antoine de Vienne spécialisés dans le traitement, y compris par amputation, du mal des ardents ou feu de St Antoine (une grave maladie provoquée par la consommation de seigle mal séché et entraînant gangrène et sensation de feu).  Les maisons se regroupent alors autour du centre hospitalier et de l’église dont la construction commença à la fin du XIIIè siècle par les abbés de St Antoine et fut achevée en 1467 lors de la construction de la façade par le même architecte que celle de Toul, Jacquemin de Lenoncourt.

                Devant l’église se trouve L’Université de Pont-à-Mousson (aujourd’hui lycée Marquette). L’édifice a beaucoup souffert lors du bombardement de la seconde guerre mondiale mais la reconstruction a respecté les volumes de la cour d’honneur de l’ancien bâtiment universitaire et les portes et fenêtres qui avaient pu être sauvées.)    

    L’université jésuite de Pont fut érigée officiellement en 1572 à Rome et mise en place effectivement en 1574 avec l’arrivée du recteur le Père Edmond Hay, un écossais. Elle est la sœur  d’autres universités créées pour lutter contre l’hérésie protestante dans les terres d’Empire, Molsheim en Alsace aujourd’hui, Ingolstadt.... Elle comprenait un collège d’humanités, une faculté des arts (philosophie), une faculté de théologie et, chose étonnante pour une université jésuite, une faculté de droit (civil et canonique) dirigée par un laïc, Pierre Grégoire juriste de Toulouse et une faculté de médecine (avec pharmacie) présidée par le médecin du Duc de Lorraine, le célèbre anatomiste Charles Lepois. La ville devint alors une ville d’étudiants, des bourgeois leur offrant des chambres pour logement, des collèges étant érigés par les diocèses lorrains ou les congrégations religieuses masculines pour recevoir les séminaristes et les scolastiques des différents instituts. 800 étudiants en 1587, 900 en 1594, 1200  au début du XVIIË siècle, ce qui est fort nombreux pour l’époque. Les jésuites étaient eux aussi nombreux: 53 en 1583 et 98 en 1595 ! et parmi eux de grandes figures spirituelles et intellectuelles comme le grand commentateur de la Bible Maldonat ou ... le découvreur du Mississippi, le Père Marquette. Des étudiants étrangers d’Irlande, d’Ecosse, de Belgique, d’Allemagne s’installent à Pont et se joignent à tous les jeunes hommes de la famille ducale et des grandes familles de Lorraine et de Bar..

    Trois étudiants célèbres, trois amis, méritent d’être mentionnés: St Pierre Fourier (1565-1640) qui garda toute sa vie un vif attachement aux jésuites et à la maison de Pont. Dom Didier de la Cour (1550-1623) réformateur bénédictin et fondateur de la Congrégation de St Vanne; Servaiz de Lairuelz (1560-1631) abbé réformateur de l’abbaye Ste Marie Majeure des Prémontrés de Pont dont les bâtiments majestueux du XVIIIè siècle s’élèvent à quelques centaines de mètres derrière l’Université ! Le rayonnement de cette université fut immense,  comme foyer tant intellectuel  que spirituel. La pédagogie humaniste de la compagnie (on lisait les auteurs anciens, on faisait du théâtre, on apprenait à débattre des questions philosophiques, théologiques ou politiques), la structuration religieuse des Exercices spirituels de St Ignace de Loyola ont profondément marqué l’élite lorraine tant laïque qu’ecclésiastique.

    La canonisation de St Ignace et de St François Xavier en 1622 a donné lieu à des fêtes somptueuses restées longtemps dans les mémoires : célébrations religieuses spectaculaires pleines de ferveur, pièces de théâtre, fête vénitienne sur la Moselle avec des orchestres, des bateaux illuminés et des feux d’artifice. Tel est l’atmosphère du catholicisme lorrain.

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    l’université des Jésuites    

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    l'église St Martin    

  • Lunéville

    Comme en promenade (2)    

    Lunéville. (Terre ducale jusqu’à la réunion de la Lorraine à la France en 1766)

     

                Pour se rendre à Lunéville depuis Nancy, il faut traverser une zone industrielle importante où s’accomplit une des activités les plus habituelles de Lorraine, l’extraction et le travail du sel. La campagne autour de Dombasle et Varangéville conserve encore quelques petites maisons de bois si caractéristiques qui étaient des puits anciens d’exploitation du sel. Au milieu de cette région se dresse la basilique St Nicolas de Port haut lieu de pèlerinage lorrain.

                La petite ville fut aux XVIè et XVIIè siècles un grand centre économique et les marchands de St Nicolas étaient connus partout dans les foires d’Allemagne et de la Hanse. Pour abriter une relique de St Nicolas rapportée de Bari au XIè, on construisit plusieurs églises dont la dernière, cette magnifique basilique gothique que les fidèles envahissent deux fois l’an en foule, à la St Nicolas d’hiver le 6 décembre et à la St Nicolas d’été, le lundi de Pentecôte.

                L’histoire de Lunéville commence avec la fondation de l’abbaye St Remy à la fin du Xè siècle et le petit bourg qui va très vite entourer le monastère et le château comtal érigé sur les bords de la Vezouze. La ville déjà conséquente au XIIè, s’enrichit au XVIIè de nombreuses fondations religieuses dans le renouveau spirituel et l’expansion catholiques de la réforme du Concile de Trente : les  Minimes s’installent en 1620,  les chanoines de St Pierre Fourier pour l’enseignement des garçons et le noviciat  en 1622, les sœurs  de Notre-Dame pour l’enseignement des filles en 1628, les capucins en 1633 et au début du XVIIIË, en 1703 les bénédictins et en 1707, les carmes !

                Le Duc de Lorraine Léopold revenu dans ses Etats en 1697, décide de quitter Nancy pour établir sa résidence à Lunéville:  en 1703, il confie la reconstruction du château à l’architecte Boffrand. Stanislas poursuivra l’embellissement du château achevé dans ses grandes lignes en 1709.

                L’église St Jacques actuelle, enserrée dans les bâtiments abbatiaux devenus municipaux après la révolution, a été construite, ainsi que l’abbaye, de 1730 à 1745. Elle ressemble beaucoup à St Sébastien de Nancy et peut-être a-t-elle le même architecte, Jean-Nicolas Jennesson. Avec la cathédrale, les églises St Sébastien et Notre Dame de Bonsecours, St Joseph des Prémontrés maintenant temple protestant, la chapelle Ste Elisabeth et celle de Maréville à Nancy,  l’abbatiale des Prémontrés à Pont-à-Mousson, la décoration intérieure de l’église St Martin de Pont-à-Mousson et nombreuses églises de villages plus modestes mais de même esthétique, nous rencontrons  l’univers spirituel intérieur du catholicisme lorrain durant plusieurs siècles : des églises claires, élégantes, chaleureuses et pleines de couleurs, toutes centrées sur l’autel et la chaire, montrant par de nombreux tableaux, la vie du Seigneur et de sa mère, la vie des Saints (François d‘Assise et Antoine de Padoue, François Xavier, Charles Borromée, Sébastien, Bruno, François de Paule, Jean Népomucène le saint de la confession, Pierre Fourier et Augustin... sont parmi les préférés). Mais il ne faudrait pas penser que le catholicisme lorrain n’est qu’extériorité et sensibilité.

                La réforme catholique fut justement de soutenir la vitalité extérieure par un grand renouveau de l’intériorité: Lunéville est ainsi la patrie du peintre Georges de la Tour (1593-1652) qui « excellait dans la peinture des nuits... » et du Frère Laurent de la Résurrection (1614-1691) carme, cuisinier, savetier et grand mystique.

                Il faut noter aussi à Lunéville la présence d’une synagogue, qui avec celles de Carpentras et Cavaillon (dans le Comtat Venaissin, terre du Pape), fait partie des plus vieilles synagogues conservées en France. Elle fut construite en 1785 par l’architecte Piroux, auteur également de la synagogue de Nancy (1787-1788) et témoigne de la vitalité de la communauté juive de Lunéville sous la conduite de son syndic Abraham-Isaac Brisac.

                Au-delà de Lunéville commence la grande forêt vosgienne. La forêt est une des grandes constituantes de l’âme lorraine; le pays est un pays de forêt avec ses étangs et ses industries typiques : les scieries et les verreries. Depuis plusieurs siècles, Baccarat, au milieu de ses forêts, poursuit cette activité artistique par excellence qu’est la production du cristal.

                C’est aussi dans les environs de Lunéville, à Brouville, que naquit en 1924, 5 ans avant la naissance officielle, la Jeunesse Agricole Catholique (JAC). En effet, l’abbé Jacques réunit dans son village la première équipe de Jeunes Agricoles « pour approfondir la foi, se soutenir et avancer dans la profession, pour être un lien catholique entre les villages » (notes de l’abbé Jacques)

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    Château de Lunéville

  • Nancy (terre de Lorraine jusqu’en 1766)

    Comme en promenade…

             Brève histoire de l’Eglise catholique de Nancy.

             A tout Seigneur, tout honneur ! Commençons notre promenade par Nancy !

             La cité porte dans ses murs, dans ses pierres, dans ses places et ses rues, toute son histoire millénaire.

             C’est d’abord la Ville Vieille. Le palais ducal s’impose aux regards, à la fois austère comme un couvent du Moyen Age – n’a-t-il point un  cloître ? N’est-il pas accolé à une grande église ? - et déjà pourtant maniéré et décoré comme un palais renaissant. La monarchie ducale lorraine s’est voulue résolument catholique, rempart à la fois contre les influences protestantes toutes proches et contre la pression ottomane exercée sur la chrétienté. Mais cette volonté, inspirée de la monarchie catholique espagnole était comme tempérée et adoucie par la grande influence des fils de St François, du Poverello d’Assise et de son évangélisme doux et exigeant et par le goût de la « république à l’italienne » représentée par les Etats régulièrement convoqués.

             L’Italie d’ailleurs est toute présente dans cette vieille ville: de nombreuses maisons sont d’une architecture inspirée des canons de la Renaissance italienne, les toits des maisons sont plats et recouverts de tuiles comme on en trouve seulement dans le midi et en Italie...

             L’arrivée de la dynastie angevine sur le trône ducal lorrain au XVè siècle a apporté au pays bien des influences  de la péninsule italienne, tant au point de vue de la culture que de la vie chrétienne. Le catholicisme lorrain sera plus joyeusement tridentin que son voisin français, plus aimable, plus humaniste aussi.

             Car avec la Renaissance culturelle, viendront aussi toutes les nouveautés chrétiennes italiennes et espagnoles. Les jésuites d’abord: leur noviciat et maison de retraite spirituelle était dans la maison St Stanislas qui existe toujours, dans la Ville Nouvelle construite par Charles III à la fin du XVIè siècle. Leur collège était au point central actuel ainsi que leur chapelle, l’église St Roch. Toute l’élite de la cité les fréquentera, officiers ducaux, grandes familles, tous les maîtres des métiers....

             Le peuple leur préfèrera toujours un peu plus les franciscains ou les capucins installés rue St Dizier actuelle....à moins qu’il ne fréquente l’ermite Pierre Seguin qui vivait retiré sur les pentes du plateau de Vandoeuvre, conseiller des uns et des autres et surtout traducteur et diffuseur des œuvres de Ste Thérèse d’Avila, la réformatrice du Carmel.

             Et il faudrait parler de tous les autres: Nancy était appelée la Cité des Moines ! .... avec les Minimes, les Tiercelins de la rue du même nom, les Antonins, les Bénédictins de St Léopold, les Prémontrés (dont l’église baroque sert aujourd’hui de temple pour la communauté protestante réformée), les Dominicains et Dominicaines (en Vieille Ville), les Carmélites, la Visitation de la même rue où le Père de Caussade, jésuite et grand spirituel du XVIIè siécle, écrira son livre: « l’abandon à la Providence divine », les Bénédictines du St Sacrement... les sœurs macarons !.. tous installés à Nancy dans le courant du XVIIè siècle.... sans oublier les Chartreux, aux portes de Nancy, à Bosserville en 1666 !

             Entre la Ville Vieille et la Ville Nouvelle, se trouve la Ville de Stanislas. Toute l’exubérance du baroque.... qui vient encore renforcer le caractère étrange de Nancy. L’architecture de la Place Stanislas est bien française... mais les grilles de Jean Lamour et les fontaines de Cyflé soulignent l’influence baroque de l’Europe centrale, de la Bohême et de la Pologne chères au bon Vieux Duc Stanislas, de l’Autriche tant admirée par les ducs Charles et Léopold.... Quand la France et l’Autriche –ennemis jurés - feront alliance en 1756, les lorrains  édifièrent un monument sur la Place d’Alliance, se réjouissant de voir leur antique fidélité impériale se marier heureusement avec leur nouvelle fidélité française. Cela tenait tant à coeur qu’on a pensé élever un monument pour célébrer cette unité !

             La cathédrale de Nancy (depuis 1777, à la création du diocèse de Nancy) si proche en conception de l’Èglise Saint André de la Vallée à Rome, elle aussi est d’un baroque, doucement atténué: c’est sans doute pourquoi elle est si mal comprise et si mal aimée des Français.... comme d’ailleurs sa voisine St Sébastien... ou Notre-Dame de Bonsecours, ce bijou comme transplanté de Pologne ou de Bohême où reposent le duc Stanislas et son épouse Catherine.

             Et puis Nancy n’a cessé de grandir. Le XIXè siècle apporte bien des nouveautés. Place Carnot, c’est l’Université. Il faut le rappeler: s’il y a une université à Nancy aujourd’hui, c’est parce que les catholiques de la ville conduits par le Baron Prosper Guerrier de Dumast se sont mobilisés et ont obtenu que soit rétablie l’antique université de Pont-à-Mousson supprimée par la Révolution et que l’Etat de 1850 voulait enterrer définitivement.

             Les églises de cette époque - St Epvre, St Léon, Sacré Coeur, St Pierre, Notre-Dame de Lourdes, St Fiacre, St Joseph...- sont toutes « néo ».... gothique, romane ou byzantine. La ville est en pleine expansion et il faut construire.... L’art civil est « l’art nouveau » plus naturaliste, social et patriotique – « gagner un Sedan artistique » - que chrétien. Encore que Gallé grave bien des passages de l’Evangile sur ses vases !

             Nancy, autour des années 1900,  est un véritable foyer artistique et intellectuel que consacre l’exposition Internationale de 1909 au parc Ste Marie. Au même moment où les artistes de l’Ecole de Nancy créent des formes et des techniques nouvelles, une trentaine de prêtres professeurs au Grand Séminaire et dans les Ècoles catholiques de la ville, créent un nouveau dictionnaire de théologie catholique qui fait encore autorité: les abbés Vacant et Mangenot aidés de leurs collaborateurs nancéens écrivent le Dictionnaire de Théologie Catholique....en même temps que bien des laïcs se lancent dans les oeuvres.

             En effet, ce qui caractérise ce XIXè siècle catholique, c’est la multitude des oeuvres, l’insatiable soif de créer des services nouveaux pour fortifier le tissu social et annoncer l’Evangile: fondations pour les orphelins, pour aider les gens de maisons hommes et femmes, catholiques sociaux à l’origine de mutuelles d’assurance, services des malades, accueil des étudiants dans une université en expansion, création de la Conférence St Vincent de Paul, animation de nombreux journaux catholiques dont un quotidien....Tout cela culmine dans le Congrès Eucharistique de Nancy en 1914. La ville garde mémoire de quelques grands personnages de l’Eglise issus de ses rangs, comme les cardinaux Matthieu et Tisserant, le Père Jean Ploussard rédemptoriste et apôtre des Touareg; elle se souvient aussi du séjour mouvementé de Charles de Foucauld, officier loin encore de la conversion.