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St Mansuy et les origines du diocèse de Toul.

            Le calendrier diocésain fête St Mansuy le 4 septembre, occasion pour nous de revenir à cette antiquité tardive où notre diocèse fut fondé.

            Faisons d’abord un petit tour dans notre pays :

            Trois peuples gaulois occupent notre région actuelle : Les Trévires (Trêves) au Nord Est ; les Médiomatriques (Metz) au Nord et les Leuques (Toul) au Sud. Aucun de ces peuples ne prit les armes contre les Romains. Aussi les Romains respectèrent-ils l’organisation des territoires (= des « cités ») et renforcèrent le côté « capitale » du chef-lieu des cités avec le titre de « cité libre » pour Toul. Les gaulois adoptèrent les dieux      romains comme en témoignent de nombreuses épitaphes retrouvées à Naix, Soulosse, Sion…[1]

         Notre pays des Leuques, à nos connaissances actuelles, connaît trois grands sanctuaires :  Grand.

            A l’écart de toute route ! La cité se développe surtout à partir du 1er siècle autour du sanctuaire dédié à Apollon Grannus (basilique, amphithéâtre pour

17 OOO spectateurs, thermes…) C’est dans ce sanctuaire que se serait rendu Constantin - qui gouvernait la Gaule, l’Espagne et la Bretagne depuis 310 - lorsqu’il avait pris la succession de son père Constance Chlore. « Il avait conforté sa légitimité en se mettant sous la protection d’Apollon dont il disait avoir eu la vision dans le temple de Grand et qu’il invoquait sous le nom du Soleil ce que traduit dans ses monnaies, sa légende « Au soleil invaincu compagnon » de l’empereur. Ses panégyristes disaient que cette vision s’était accompagnée de la promesse d’un pouvoir universel. »[2] « La nature du pèlerinage de Grand est difficile à cerner. De nombreux fragments de statues et des inscriptions permettent de se faire une idée des divinités qui figuraient dans le sanctuaire: on a repéré des allusions à Apollon, mais aussi à Hygie (déesse de la Santé), à Esculape, à Bacchus, à Mercure, à Jupiter (en cavalier écrasant l’anguipède), à Epona, à Minerve, aux Déesses Mères. Ces représentations, très classiques et de tradition hellénistique, prouvent que l’influence romaine s’était imposée totalement, au détriment de l’art et des conceptions religieuses indigènes. Par un cheminement rituel, les pèlerins franchissaient d’abord le pomerium en faisant acte d’allégeance aux dieux, avec quelques offrandes, gâteaux et fruits. Ils allaient ensuite se purifier le corps dans l’un des établissements de bains (deux à l’extérieur du rempart, deux à l’intérieur) qui étaient alimentés par des aqueducs de surface. Ils entraient alors dans l’enceinte, puis dans le portique pour aller à la fontaine sacrée profiter de ses vertus thérapeutiques. Un ex-voto trouvé sur le site porte la formule «somno jussus» («ayant reçu des consignes pendant son sommeil»). Cela semble indiquer qu’on y pratiquait l’incubation : sous le portique, couché sur le sol (ou sur la peau d’un l’animal qu’il a offert en sacrifice), le consultant s’endormait et ses rêves étaient censés lui apporter la révélation prophétique qu’il avait sollicitée ou lui donner des indications sur la manière de recouvrer la santé. Apollon lui-même pouvait lui apparaître en songe pour lui indiquer le traitement à suivre. Ce rite d’incubation était pratiqué à Épidaure et, à Rome, dans le sanctuaire asclépien de l’île Tibérine. »

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Le théâtre – amphithéâtre de Grand. Edifice mixte fréquent en Gaule.

Deneuvre.

            L’autre grand temple attirant de nombreux fidèles était celui de Deneuvre  au Sud Est du domaine des Leuques. Le Temple était dédié à Hercule et le culte se rendait dans une zone de sources : la divinité romaine assumait la vision gauloise que les dieux se communiquaient aux hommes par l’eau des sources. Le mythe des 12 travaux d’Hercule est relu à cette époque comme un itinéraire d’humanisation que l’homme doit reproduire aidé par le dieu. C’est aussi un lieu de guérison (on ne sait de quoi) et d’exaucement : les stèles - ex voto – en témoignent.

            En effet, de très nombreuses stèles – sculptées sur place dans la pierre locale - d’Hercule dormant ou combattant, témoignent de la ferveur et de la fréquence du lieu. Créé vers 150 de notre ère, le temple connut un maximum de fréquentation dans les années qui suivirent. Puis alternent les périodes prospères et plus faibles. Vers 375, le lieu est systématiquement et minutieusement détruit, sans doute par la communauté chrétienne locale.

            Le musée actuel de Deneuvre est situé sur l’emplacement du temple dont il reconstitue avec minutie la réalité de l’époque prospère.

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Petit temple sur une des sources. Temple  reconstitué au musée de Deneuvre

            Sur la colline de Sion, troisième sanctuaire, les celtes vénéraient le dieu de la Guerre Wotan et la déesse de la fertilité et de l'abondance Rosmerta. Lors de la conquête romaine de la Gaule, l'enceinte de Sion était une des places forte des Leuques. La colline connaissait alors un commerce actif avec la péninsule Italique, fait de céramiques campaniennes, d'amphores et de vaisselle métallique. Elle constituait géographiquement un point de contrôle, implanté sur l'axe nord-sud reliant la Saône à la Moselle.

            « De nombreux vestiges d’habitation ont été mis au jour sur le site pour cette période : fondations de murs, caves, fragments de mosaïques. Cet ensemble reflète une certaine richesse, qui se traduit aussi par du mobilier : fibules, épingles, plats et statuettes en bronze (dont le célèbre Hermaphrodite).  Au lieu-dit Les Grands Champs (sur la colline de Sion), une nécropole a livré plusieurs tombes à incinération ou à inhumation. Enfin, une inscriptionau dieu romain du commerce Mercure et à la déesse gauloise de la fertilité et de l’abondance Rosmerta semble indiquer l’existence d’un sanctuaire gallo-romain. »[3]

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 Saxon-Sion, La Côte de Sion, Inscription en l'honneur de Mercure et Rosmerta, Musée Lorrain - Pierre Mignot 

         Le pays des Leuques a une capitale, renforcée dans l’autorité par les Romains. Toul – dont la grande rivale est Sion, sans doute plus riche - est alors une petite cité gallo-romaine dont la fondation remonte aux années qui ont suivi la conquête de la Gaule par César (58 av. JC). La rue Michâtel repose sur le « cardo » de la ville romaine situé environ 8 m sous le niveau actuel.

            La cité est bien reliée, ce qui fut sans doute sa force face à Sion.

            Par les routes : celle venant de Lyon par Langres à Toul ; par là, la cité était reliée avec le sud, lieu de culture et d’économie prospère. A partir de Metz, la route se dédoublait de chaque côté de la Moselle pour gagner Trêves et ensuite, Cologne ou Mayence. A Metz, cette route croisait l’axe Ouest/Est venant de Reims vers Trêves. De plus, une route venant de Reims passait à Toul par la vallée de l’Ornain et une autre allait vers le Donon et Strasbourg. Une autre route partait de Toul vers Sion. (La route vers Colombey les Belles aujourd’hui)

            Par les rivières : La Moselle surtout pour le transport des personnes et des biens, notamment la pierre des carrières mais aussi la Seille (pour le transport du sel), la Meurthe (pour le flottage du bois)

            L’édit de Caracalla en 212 conféra la citoyenneté romaine à tous les habitants de l’Empire libres.

            Mais l’anarchie dans l’Empire entre 235 et 285 permit l’invasion des Francs et des Alamans et un sentiment d’abandon par l’autorité romaine pour les populations. Un redressement eut lieu de la part des autorités impériales entre 285 et 350. Mais des incursions barbares reprirent en 352, 356-57, 366-67, 377-78… Les peuplades arrivaient par la Moselle ou par le seuil de Saverne.

            La réorganisation de Dioclétien et de Constantin donna une grande importance à Trêves où résidait le gouverneur - consulaire de l’ordre sénatorial - de la région et conduisit les villes à se doter de remparts et à resserrer leur surface, signe d’une réelle crise économique. Seule Metz reste une grande ville. Certaines villas luxueuses de campagne furent abandonnées à cause des invasions.

Une diffusion du christianisme par les militaires à partir du IIIè siècle

 maurice.png St Maurice d’Agaune et ses compagnons soldats, coptes venus de Thèbes en Egypte, martyrs du Valais, sont morts pour leur foi vers la fin du IIIème siècle. Les soldats de la légion thébaine avaient reçu l’ordre de tuer tous les habitants près d'Octodure (la ville de Martigny au Nord des Alpes), qui avaient été convertis au christianisme le ministère de St Materne. Le refus de saint Maurice et celui de sa légion d'obéir à cet ordre, a été la cause d'un célèbre martyre, le massacre de la légion  thébéenne. Le christianisme se diffusa beaucoup dans les milieux militaires et par eux, dans l’Empire. Un des plus vieux sanctuaire toulois, dédié à St Maurice et construit par St Evre au début du VIème siècle, peut être un témoin de cette mission des militaires et même de l’influence de St Maurice d’Agaune.

         IVème siècle      

         Sans doute aussi une annonce du Christ par St Athanase d’Alexandrie… allant en exil à Trêves et passant nécessairement à Toul. Quand on connaît la fougue et le zèle apostolique du prélat, ce serait étonnant qu’il n’ait pas parlé du Christ à Toul !

            En effet, le 5 février336, Athanase doit prendre le chemin de l'exil à Trêves. Il y séjourne pendant un peu plus d'un an, du printemps 336 à juin 337. Il  a des compagnons égyptiens comme lui et y est bien reçu par l'évêque de la ville St Maximin. Réside également à Trèves le « César Constantin », fils aîné de l'empereur, qui devient le protecteur d'Athanase. L'empereur Constantin 1er  meurt  dans la ville de Nicomédie le 22 mai 337, et la nouvelle parvient à Trèves dans les premiers jours de juin. Le 17 de ce mois, le césar Constantin envoie une lettre au peuple et au clergé d’Alexandrie : il y affirme que l'intention de son père était de rétablir Athanase sur son siège, et que lui-même va exécuter cette volonté. Athanase arrive le 23 novembre à Alexandrie, où il est accueilli en triomphe par ses partisans, mais où ses ennemis provoquent aussi des tumultes.

            Et Athanase n’est pas le seul père de l’Eglise d’importante à être passé à Toul.  St Jérôme (347-420), St Martin (316-397) et St Ambroise (né à Trêves en 340) se rendant à Trêves ou en revenant,  passèrent dans la ville. Le poète Ausone (309-394) précepteur de Gallien puis préfet des Gaules séjourna à Toul et chanta la beauté de la Moselle. (extrait de l’Idylle  X[4]) : On pourra constater toute l’activité économique de ce fleuve évoquée par Ausone autant que la beauté de ses rives :

« Ces belles eaux de la Moselle qui roulent à leurs pieds[5] avec un doux murmure. Salut, fleuve béni des campagnes, béni des laboureurs ;  fleuve riche en coteaux que parfume Bacchus, fleuve tout verdoyant, aux rives gazonneuses : navigable comme l’océan, entraînée sur une douce pente comme une rivière, transparente comme le cristal d’un lac, ton onde en son cours imite le frémissement des ruisseaux, et donne un breuvage préférable aux fraîches eaux des fontaines : tu as seul tous les dons réunis des fontaines, des ruisseaux, des rivières, des lacs, et de la mer même, dont le double flux ouvre deux routes à l’homme. Tu promènes tes flots paisibles sans redouter jamais le murmure des vents ou le choc des écueils cachés. Le sable ne surmonte point tes ondes pour interrompre ta marche rapide, et te forcer de la reprendre ; des terres amoncelées au milieu de ton lit n’arrêtent point ton cours, et tu ne crains pas qu’une île, en partageant tes eaux, ne t’enlève l’honneur mérité du nom de fleuve ! Tu présentes une double voie aux navires, soit qu’en se laissant aller au courant de ton onde, les rames agiles frappent ton sein agité ; soit qu’en remontant tes bords, attaché sans relâche à la remorque, le matelot tire à son cou les câbles des bateaux. Combien de fois, étonné toi-même du retour de tes eaux refoulées, n’as-tu pas pensé que ton cours naturel s’était ralenti ? L’herbe des marécages ne borde pas tes rives, et tes flots paresseux ne déposent point sur tes grèves un limon impur. Le pied qui t’approche ne se mouille jamais avant d’avoir effleuré tes ondes.

            O Moselle, on doit te célébrer aux plages étrangères, te célébrer partout et non pas seulement aux lieux où, jaillissant de ta source, tu découvres l’éclat doré de ton front de taureau, où tu traînes à travers les champs tes ondes calmes et sinueuses, aux ports enfin de la Germanie, où s’ouvre ton embouchure. Tu seras connue des fontaines, des sources vives, connue des fleuves azurés, des antiques forêts qui font l’orgueil des campagnes ; pour toi la Drôme, pour toi la Durance qui porte çà et là sa course incertaine, pour toi les fleuves des Alpes auront des hommages, ainsi que le Rhône lui-même, qui traverse une cité qu’il partage, pour donner aussi un nom à sa rive droite. Et moi, je te recommanderai aux flots bleus des étangs, aux grandes rivières mugissantes, à l’océan de ma Garonne. »[6]

         L’absence de martyr dans notre région sous le règne de Dioclétien – dont la persécution généralisée et organisée fut terrible pour els chrétiens – montre la petitesse te la discrétion de la communauté chrétienne de Toul.

         L’organisation de la communauté autour d’un évêque :

          C’est dans la 1ère moitié du IVè ( 50 ans près Metz qui eut son évêque dans le  dernier quart du IIIè) que Mansuy/ Mansuet (Mansuetus = le doux)  arrive à Toul et devint le premier évêque d’une communauté chrétienne déjà existante.  Vraisemblablement, Mansuy est un évêque itinérant de la Belgica prima, le premier à s'être fixé en fin de vie à Tullum. Il aurait exercé son ministère de 338 à 375. La première Vie de St Mansuy fut écrite au Xème siècle, par le moine Adson abbé de Montier en Der.

            Ce qu’on sait de sûr, c’est que Mansuy édifia aux portes de la Cité, hors les murs, un oratoire, une petite église qu’il dédia à St Pierre et dans laquelle il fut enterré. Ce lien à St Pierre est très symbolique et intéressant : cela ne veut pas dire, comme on l’a enseigné longtemps, que l’apôtre Pierre aurait envoyé Mansuy à Toul ; cela montre simplement l’attachement naissant au siège de Pierre par lequel Toul est rattachée à la mission apostolique.  Plus tard une abbaye s’éleva sur son tombeau jusqu’à la Révolution et son corps demeura à cet endroit jusqu’en 1990.

            Le miracle le plus célèbre du saint fondateur est la résurrection du fils du gouverneur romain de la ville qui s’était noyé dans la Moselle.

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Tombeau de St Mansuy sculpté au XVIè par Mansuy Gauvain un des grands sculpteurs de la Renaissance en Lorraine. Il est aujourd’hui dans la cathédrale de Toul.

         Il ne faut pas imaginer que le premier oratoire créé par St Mansuy avait la forme d’une chapelle… En cette période qui suit de près la Paix de l’Eglise par l’édit de Constantin de 313, ce doit être encore une « maison église » : les chrétiens avaient aménagé des maisons déjà existantes ou construit directement des maisons dont l’aspect extérieur était celui d’une maison mais dont l’aménagement intérieur était adapté aux célébrations chrétiennes. On les appelle des « Maisons églises » sans penser qu’il y eut un plan uniforme tout de suite !

            Les fouilles archéologiques  nous ont offert plusieurs exemples de ces « maisons églises » : la mieux conservée est celle Doura Europas dans le sud de la Syrie actuelle, Cirta (l’ancienne Constantine) et Théonas dans la région d’Alexandrie. Des oratoires du même type se trouvent dans les villes des diocèses du Sud de la France à la même époque.

            St Mansuy, selon la tradition, eut pour successeur St AMON, ermite au « val de St Amon » entre Favières et Gémonville. Il y vivait avec quelques disciples. Devenu évêque, il alternait entre son ermitage, Toul et la région. On a gardé aussi le souvenir de sa lutte contre l’hérésie, sans doute l’arianisme. Il fut inhumé à côté de St Mansuy à l’oratoire St Pierre. On a retrouvé son corps au XIè sous l’épiscopat d’Hermann et transporté ses reliques à la cathédrale. Les deux successeurs St ALCHAS et St CELSIN furent inhumés à côté de St Mansuy. Nous ne savons rien d’eux. 

         Les premiers saints, martyrs sous Julien l’Apostat ou non

         Sainte Libaire

         Elle naquit et mourut à Grand d’où sept voies romaines divergeaient en étoile.Sa vie nous est connue par une Passion écrite au XIème siècle !Elle était bergère, chrétienne de la première génération à Grand, elle fut arrêtée pour ce motif et fut sommée d’adorer les divinités officielles. Son refus entraîna son exécution, sur la voie romaine, en direction de Soulosse, à la deuxième  borne milliaire. Les fidèles ramenèrent son corps dans la ville, aux portes, là où s’élève aujourd’hui la chapelle qui lui est dédiée.Un cimetière – qui existe toujours - commença à se former autour de sa tombe.
         

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  La chapelle Ste Libaire à Grand

St Elophe.

         C’est le premier martyr lorrain et l’un des plus anciens personnages religieux connus de notre histoire. Comment le connaissons-nous ?  Par une Passion contenue dans un manuscrit de Cologne rédigé peu après 1036 et conservé à la bibliothèque royale de Bruxelles. D’autres manuscrits se trouvent dans les bibliothèques de Glogaw  en Silésie, de Ratisbonne, Trêves… La région, rappelons-le,  se trouvait alors traversée par une des voies romaines les plus importantes de l’Occident, celle qui reliait Rome à Cologne par les vallées du Rhône, de la Saône, de la haute Meuse et de la basse Moselle.

Nous sommes au IVème  siècle, sous Julien l’Apostat (361-363). Selon cette Passion, Elophe appartenait à une famille patricienne de Grand et il aurait plusieurs frères et sœurs :  Euchaire, Menne, Libaire, Suzanne, Ode et Gontrude.  

 C’était un chrétien zélé et intrépide qui n’hésitait pas à proclamer sa foi à Grand et à Soulosse (Solimariaca), oppidum gaulois situé sur le haut de la colline et signalé dans les anciennes cartes comme l’Itinéraire d’Antonin et la Table de Peutinger. Solecia situé un peu en dessous de l’oppidum était un relais romain situé auprès du pont qui enjambait le Vair. Le zèle d’Elophe le conduisit même à détruire des idoles païennes.

Arrêté par les autorités romaines locales, il est jeté en prison, jugé et condamné à la décapitation, signe de sa condition sociale élevée. L’exécution a lieu au bord du Vair à Soulosse aujourd’hui. La légende raconte qu’aussitôt après son exécution, il prend sa tête dans ses mains et remonte la colline voisine avec un arrêt dans la montée au bord d’un rocher qu’on voit encore, avant de mourir en haut de la colline là où se trouvent aujourd’hui l’église et son tombeau. Un pèlerinage se crée aussitôt et de nombreux miracles. Telle est rapidement résumé le texte de cette Passion lue, dans la liturgie de la fête, aux fidèles à Cologne chaque année au 16 octobre. 

Le portement de tête : ce fait est raconté pour la vie d’une soixantaine d’autres martyrs ! On les appelle les saints céphalophores. Le plus célèbre est St Denis de Paris. Ce détail a une portée mystique : St Jean Chrysostome dit à propos de deux martyrs d’Antioche : « De même que les soldats montrant les blessures qu’ils ont reçues en combattant, s’adressent au Roi avec confiance, ainsi les martyrs portant dans les mains leur tête coupée, obtiennent du Roi des Cieux tout ce qu’ils veulent. »

L’archéologie complète nos sources : le catalogue des fouilles faites à Soulosse présente une centaine de très beaux objets découverts en 1948 et 1967. Parmi ces objets, deux, du VIème siècle, nous intéressent plus particulièrement dans notre histoire : une inscription lapidaire déposée au musée d’Epinal, en mémoire de deux femmes qui étaient devenues chrétiennes ; une coupe de bronze sur laquelle est gravée le poisson (en grec, ichthus : avec chacune des lettres ont peut composer une profession de foi chrétienne : i JESUS ch Christ th de Dieu u le fils s sauveur) 

De plus, autour du tombeau du saint dans l’église, on a trouvé des tombeaux mérovingiens, datant du VIème siècle, de notables qui se sont fait enterrés là, volontairement. La dévotion au saint date donc d’une époque proche de son martyre.

St Gérard en 965 vint vénérer les reliques, en fit trois parts, une pour le lieu, une pour la cathédrale de Toul et une pour Cologne (Grand St Martin) qu’il se chargea lui-même de porter dans sa vile natale. On possède même le parchemin du Xème siècle relatant l’acte de St Gérard !

On peut suivre à pied le chemin du martyre : La chapelle Ste Epéotte : lieu de la décapitation dans un méandre du Vair. Elle date du XVIème siècle. Elle fut tenue longtemps par un ermite. A côté de St Elophe, sa sœur Ste Libaire. La fontaine :  à mi-côte. Une source d’un versant calcaire bien connu dans nos régions.  La reculée : une petite grotte dans un rocher, lieu de  repos du martyr ;  la chaire de St Elophe dans le cimetière : elle proviendrait d’un édifice gallo-romain des alentours car la pierre n’est pas celle du pays ou peut-être même de l’amphithéâtre de Grand, comme les sièges curules réservés aux notables. Enfin, l’église et le tombeau : du XIème siècle et du XIIIème, terminée au XVIè. Ce tombeau est une dalle sur sept petits piliers auxquels s’adossent des figurines  humaines : la famille de St Elophe ? Mais il y a aussi Véronique et son linge ? St Elophe, en gisant, est représenté en diacre… puisqu’il prêchait ! Son visage est particulièrement paisible.

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Chapelle Ste Epéotte au bord du Vair         

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Tombeau de St Elophe dans l’église

         Sainte Menne, non martyre.

            Nous ne savons pas beaucoup de choses sur sa vie. Seule une Vie du XIIème siècle nous parle d’elle.  Menne est née à Soulosse. Elle fut confiée à l’évêque Memmie de Chalon sur Marne. C’est là que se précisa la vocation d’ermite de la jeune femme. Elle vécut d’abord dans la solitude en Champagne puis revint en Lorraine, dans le Saintois, entre Poussay et Puzieux. Elle  mourut le 3 octobre d’une année de la fin du IVème siècle, tout près du village de Blénod les Toul. Ses reliques furent transférées à l’abbaye de Poussay par St Léon IX. Au XVIè siècle, Hugues des Hazards, chancelier de Lorraine et bientôt évêque de Toul, originaire de Blénod, construisit une chapelle en l’honneur de Ste Menne sur le territoire de sa commune d’origine.



[1] Voir musées d’Epinal et Lorrain

[2] L’antiquité tardive en Provence  Naissance d’une chrétienté sous la direction de Jean Guyon et Marc Huijmans. 2013 p. 25-26

[3] Présentation  sur site de Sion.

[4]Traduction E.F. Corpet, 1843

[5] il s’agit des murailles de la cité gallo-romaine

[6]Ausone ou Decius ou Decimus Magnus Ausonius, est né en Aquitaine soit à Bazas (Gironde) soit à Burdigala (actuelle Bordeaux) en 309/310 et mort en 394/395 ap. J.-C. dans la villa paternelle située dans le vignoble bordelais entre Langon et La Réole où il s'est retiré à la mort de son protecteur, l'empereur Gratien. Il fut professeur et conseiller politique du Bas-Empire romain. Ausone est surtout renommé par son statut littéraire : poète de langue latine, ce fin lettré du Bas Empire occidental est l'auteur de vingt livres en latin. Mais la littérature française le tient pour le premier représentant d'une longue tradition, celle des lettres latines de France et de l'usage du latin moderne dans ce pays jusqu'à nos jours.

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